Que ça fait du bien ! Des dirigeants politiques intègres,
compétents et courageux, qui transforment leur pays en alliant le développement
économique, la solidarité et la démocratie. Où ça ? En Bolivie ! Evo Morales et
le Mouvement vers le socialisme (MAS) sont au pouvoir depuis huit ans, et ça
marche. Le pays le plus pauvre d’Amérique du Sud décolle.
C’est peu dire que les braves gens d’ici attendait avec
morgue de voir ces Indiens, amis de Chávez, se prendre un splendide râteau. A
l'épreuve des faits, le résultat est une réussite peu commune, et Evo Morales
ne lâche rien : « Le socialisme c’est le bien-être, c’est partager la richesse.
C’est ce que faisaient nos ancêtres, à une plus grande échelle, avec la
technologie et la modernité productive ».
L’équipe d’Evo Morales est arrivée au pouvoir en 2006 par
une magnifique victoire électorale qui faisait suite à des années de luttes
sociales et politiques. Le libéralisme économique avait ruiné l’Etat, la masse
de la population vivait de l’économie souterraine, et des parties entières du
territoire menaçaient de faire sécession. Le nouveau régime a pris le taureau
par les cornes pour restaurer l’Etat et son autorité.
Le premier volet, dès mai 2006, a été la nationalisation du
secteur des hydrocarbures. Depuis, quinze grandes entreprises pétrolières,
cimentières et minières sont passées sous le contrôle de l’Etat. L’une des
richesses prometteuses est le lithium, présent en masse dans le Salar de
Uyuni, le grand désert de sel, et toute concession pour son exploitation est
désormais interdite. Des choix politiques qui parlent pour un mouvement né en
révolte à la privatisation de l’eau, au début des années 2000.
Le prix des hydrocarbures étant à la hausse, les recettes
publiques se sont accrues,… et comme le gouvernement gouverne, l’argent est
resté au pays, au lieu de partir vers les maisons-mères des compagnies. Entre
2005 et 2008, les recettes de l’Etat ont bondi, passant de 58 à 401 dollars par
habitant, pour atteindre 20 % du PIB.
Le gouvernement a bloqué l’argent, pour se faire une grosse
cagnotte : les réserves – 8,4 milliards de dollars – atteignent 47 % du PIB. Et
c’est géré : l’inflation qui était folle a été maîtrisée, le budget laisse un
excédent lié aux recettes pétrolières, et depuis 2006, la moyenne de croissance
est à 5,2 % par an. En 2013, le chiffre est 6,5 %, permettant à l’Etat
d’investir directement plus de 4,3 milliards d'euros dans l’économie nationale.
Assis sur ce trésor, le gouvernement, pour percuter la crise
de 2009, a lancé un programme de création d’infrastructures et de soutien à la
consommation. Deux moteurs, donc : les exportations de matières premières et la
demande intérieure. Les richesses exploitées sont essentiellement le gaz, et le
lithium, et le gouvernement veut sur place des usines de transformation, pour
exporter avec une forte valeur ajoutée.
Lutter contre la pauvreté
Le camarade Evo respecte son engagement de lutte contre la
pauvreté, avec « un nouveau modèle économique social productif », dont la base
est un vrai programme de redistribution de la richesse nationale à destination
de la population la plus pauvre, dans le cadre de politiques déterminées.
Comme on ne fait rien sans argent, le régime a créé dès 2007
la Banque de Développement Productif qui accorde des prêts aux petits
agriculteurs, et l’Entreprise de Soutien à la Production Alimentaire (EMAPA)
qui finance l’achat des marchandises aux petits et moyens producteurs, pour
ensuite les revendre au reste de la population. Résultat : une augmentation de
17 % des surfaces cultivées par les petits paysans, et la stabilisation des
prix agricoles. Felipe Jaramillo, directeur de la Banque mondiale pour ce
secteur, reconnait que « La Bolivie est de moins en moins un pays à bas revenus
» et qu’elle « ne devrait pas tarder à entrer dans la catégorie des pays à
revenus moyens ».
La population attend beaucoup de ce « gouvernement des mouvements
sociaux ». Alors que s’approchait la réélection de 2009, les Etats-Unis avaient
rompu les accords commerciaux qui existaient avec la Bolivie, et tenté le plan
classique des manips de l’opinion. Mais, ils se sont cassés les dents.
Il faut dire qu’Evo Morales a respecté son engagement de
combattre le « colonialisme interne » de l’Etat bolivien, avec l’exclusion
structurelle de la majorité indienne du pays. Le premier mandat s’est clôt avec
l’adoption de la nouvelle constitution de janvier 2009, remplaçant « l’Etat
républicain » par « l’État plurinational », avec des actions résolues en faveur
des droits des Amérindiens, et des structures de décisions qui ne limitent pas
la démocratie au vote, une fois tous les quatre ans.
Une réussite remarquable appelée à rejaillir sur l’ALBA –
Alternative bolivarienne pour l’Amérique latine –, une union politique et
économique lancée par Hugo Chávez. Evo Morales résume : « Nous avons
atteint aujourd’hui 35 % de participation de l’Etat dans l’économie nationale.
C’est ce qui a permis de changer l’image de la Bolivie dans le domaine
économique et financier. Le fait d’avoir dans le passé tout laissé entre les
mains du secteur privé nous a fait hériter d’un peuple mendiant et d’un Etat
mendiant et dépendant des organismes internationaux. Tout cela, nous l’avons
changé en peu de temps. Durant ces huit années de gouvernement, nous avons
démontré que l’Etat est capable de gérer ses entreprises. C’est ce qui a
conduit à ces résultats. »
Les élections de 2014 se présentent pas mal pour Evo
Morales, à 60% dans les sondages, et face à une opposition divisée.
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