Paris, 14 mars 2014 — Mardi 18 mars à 10h, la
commission « industrie » (ITRE)
du Parlement européen prendra une décision majeure pour l'avenir de la
neutralité du Net en Europe. L'adoption de ce rapport pourrait marquer un point
de non-retour. Deux visions opposées du futur d'Internet divisent les deux plus
grands groupes politiques du Parlement européen, le parti social-démocrate
(S&D) et le parti conservateur (PPE). L'issue du vote pourrait reposer sur
les députés du parti libéral (ADLE), qui semblent n'avoir pas encore choisi
quelle version soutenir, bien que leur rapporteur, Jens Rohde,
les pousse à l'adoption des dispositions anti-neutralité du Net. Si elles
étaient votées, ces mesures mettraient fin à l'Internet tel qu'il existe
aujourd'hui, portant une atteinte significative à la liberté de communication
et d'innovation.
Avant cela, le travail des rapporteurs s'est révélé
particulièrement intense à cause de la division des groupes politiques sur le
chapitre consacré à l'Internet ouvert. La proposition de Pilar del
Castillo Vera(ES – PPE), la rapporteure ITRE sur le dossier, déforme
le principe de neutralité du Net afin de plaire aux lobbys télécoms. Ses amendements
de compromis (pdf commenté par LQDN) autorisent le
contournement de la neutralité du Net en permettant aux opérateurs télécom de
conclure des accords avec les fournisseurs de services (par exemple YouTube ou
Netflix) afin de prioriser leurs flux au travers des soi-disant « services
spécialisés ». Malheureusement, bien que les membres PPE de la commission
LIBE aient largement
soutenu des dispositions pro-neutralité du Net, les
propositions de Pilar del Castillo Vera sont suivies par son groupe politique
(PPE) en ITRE.
La députée Catherine
Trautmann (FR – S&D), rapporteure fictive de son groupe, a
adopté une position ferme en faveur de l'innovation et de la libre concurrence
dans l'économie numérique, et a proposé une autre version du même amendement de
compromis. Celui-ci énonce clairement que les « services
spécialisés » ne peuvent être utilisés par les gros opérateurs télécom
pour nouer des partenariats avec les géants de l'Internet afin de contourner le
principe de neutralité du Net et asseoir leur position dominante sur Internet
et l'économie numérique en général (voir un tableau
comparatif de ces deux amendements).
À ce stade, la bataille pour un Internet ouvert est loin
d'être gagnée. Les membres du groupe libéral1(ALDE)
– dont les voix seront déterminantes pour l'issue du vote – ont juqu'ici refusé
de s'associer au vote des Socio-démocrates et des Verts, préférant soutenir la
dangereuse proposition de la rapporteure Pilar del Castillo.
Il est primordial que les citoyens européens exigent de chaque membre de la
commission ITRE,
et particulièrement de ceux du groupe ALDE, qu'il protège l'intérêt public en
adoptant l'amendement de compromis de Catherine Trautmann sur un
« Internet ouvert », plutôt que celui de Pilar Del Castillo.
« Le Parlement doit profiter du prochain vote de la
commission "Industrie" pour défendre Internet contre les opérateurs
télécoms et les géants US du numérique. Les dispositions proposées tant par la
commissaire européenne Neelie Kroes que par la rapporteure du Parlement Pilar
del Castillo Vera contiennent d'importantes failles qui menacent la neutralité
du Net, la concurrence et la liberté de choix des utilisateurs. Il est
impératif de les rejeter. À l'approche des élections
européennes, les citoyens doivent demander des comptes à leurs
représentants et s'assurer que l'Internet tel que nous le connaissons soit
protégé des intérêts à court terme de certaines entreprises dominantes » conclut
Félix Tréguer, cofondateur de l'association La Quadrature du Net.
Chaque citoyen peut agir pour défendre la neutralité du Net
en contactant
ses eurodéputés et en les appelant à mettre en place de solides
protections pour un Internet libre. Pour participer à ces actions, rendez-vous
sur le site savetheinternet.eu.
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