Steen Jakobsen, économiste en chef chez Saxo Bank, m’a
envoyé des liens intéressants concernant l’explosion de l’investissement et de
la dette en Chine.
Robert Peston s’est rendu en Chine pour déterminer
si le géant économique peut en effet être en difficulté. La Chine est désormais
la deuxième économie du monde, et elle n’a cessé de gagner en importance au
cours de ces 30 dernières années. Alors que l’Angleterre est confrontée à la
pire récession de cette génération, le miracle économique de la Chine intrigue
le monde.
A l'occasion de l'émission This World tournée pour BBC Two, Peston révèle ce qu’il s’est vraiment passé en Chine depuis l’effondrement économique de 2008 en Occident. C’est un conte de dépenses et d’investissements telle que nous n’en avons encore jamais vu au cours de l’Histoire humaine – 30 nouveaux aéroports, 35.000 kilomètres d’autoroutes, un nouveau gratte-ciel tous les cinq jours depuis cinq ans. Mais ce qui lie ce conte à la situation en Occident est le crédit qui a servi à construire tout cela. L’économie chinoise se retrouve désormais endettée et se demande comment cette monnaie pourra un jour être remboursée.
En s’entretenant avec l’ancien Secrétaire américain du
trésor Henry Paulson, l’ancien directeur du FSA Lord Adair Turner, et l’analyste
bancaire Charlene Chu, Robert Peston révèle que les
dépenses extraordinaires de la Chine ont laissé le pays avec une dette qui ne
pourra découler que sur un effondrement économique dont les conséquences sont
inconnues de tous.
La Chine fera-t-elle encore une fois trembler le
monde ?
Dans le deuxième épisode de l’émission qui sera diffusé
mardi, voici Will ChinaShake the
World Again?
Ce que j'essaie de souligner dans cette émission, à paraître
mardi à 21 heures sur BBC Two, est que le ralentissement économique de la
Chine, couplé aux récentes tensions qui se sont manifestées sur ses marchés
financiers, peut être perçu comme la troisième vague de la crise financière
globale qui a débuté en 2007-08 (la première ayant été la débâcle de Wall
Street et de la City, et la deuxième la crise de la zone euro).
Pourquoi dis-je cela ?
En automne 2008, après l’effondrement de Lehman, les
échanges commerciaux ont diminué à l’échelle globale. Les conséquences en ont
été catastrophiques pour la Chine, dont la croissance a été largement générée
par les exportations vers les pays riches. Quand nos économies se sont
effondrées, nous avons arrêté d’acheter – et partout en Chine, des usines ont
cessé leurs activités.
J'étais en Chine à cette époque, et j’ai pu voir des files
de travailleurs pauvres, leurs affaires sous le bras et leurs enfants sur le
dos, retourner vers leurs villages. La situation était alarmante pour
le gouvernement et menaçait de rompre le contrat implicite entre le parti
communiste au pouvoir et le peuple chinois – ou l’idée que le peuple accepte
d’abandonner ses droits démocratiques pour s’enrichir.
Avec le soutien du gouvernement des Etats-Unis, le
gouvernement chinois a mis en place un programme de stimulus de très grande
échelle : 400 milliards de livres de dépenses gouvernementales directes et
l’ordre passé aux banques d’ouvrir leur portefeuille et de prêter comme si
demain n’existait pas.
Et dans un sens, cette solution a fonctionné. Alors que les
économies occidentales et japonaise continuaient de stagner, la Chine a explosé
– son niveau de croissance a de nouveau atteint 10% par an, qui était son
rythme de croisière depuis 30 ans.
Mais les sources de sa croissance ont changé, et ne
pouvaient être que limitées.
Un investissement toxique
Il y a deux manières de voir les choses.
Avant même le programme de stimulus, la Chine investissait
plus que n’importe quel autre pays au cours de l’Histoire.
Avant l’effondrement, ses investissements s’élevaient à 40%
du PIB, soit trois fois le taux moyen d’investissement des pays développés, et
bien plus que ce que le Japon a investi pendant sa phase de développement –
avant les années 1990.
Après l'effondrement, après le stimulus et toutes ces
constructions, les investissements de la Chine ont atteint un record sans
précédent de 50% du PIB, niveau autour duquel ils stagnent encore aujourd’hui.
Voici où se trouve le problème : lorsqu’une économie de
cette taille investit tant pour générer du capital et des emplois, il est
certain que ses investissements ne génèreront pas de retours économiques et ne
sont pas rationnels.
Mais ce qui rend un investissement toxique est la manière
dont il est financé : les prêts ont explosé. La dette de la Chine augmente
de 15% du PIB chaque année et est passée de 125 à 200% du PIB depuis 2008.
« Beaucoup de gens savent que la Chine a fait
l’expérience d’un boom du crédit, mais très peu en réalisent l’échelle. En
2008, le secteur bancaire chinois était de 10 trillions de dollars.
Aujourd’hui, il est de 24 à 25 trillions de dollars. Cette augmentation est égale à la taille du secteur bancaire
commercial américain, à qui il a fallu plus d’un siècle pour être construit. La
Chine aura donc répliqué le système américain en seulement cinq ans. »
Il n’y a pas d’exceptions aux leçons de l’histoire financière :
prêter à ce taux empêche les débiteurs de rembourser et pousse les créditeurs à
accumuler les pertes. La question n’est pas de savoir si cela se produira, mais
quand, et à quelle échelle.
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