Le constat accablant d'un ministre du travail
sans solution pour l'emploi
FORUM ÉCO - Libération - Commentaires de Frédéric Lutaud, membre du Bureau national du Parti socialiste pour la Motion 4
- «Le plein emploi est un objectif que l’on doit se fixer»
sans solution pour l'emploi
FORUM ÉCO - Libération - Commentaires de Frédéric Lutaud, membre du Bureau national du Parti socialiste pour la Motion 4
Le ministre du Travail était l'invité du Forum Eco de
«Libération» pour débattre de la crise de l'emploi. Voici ce qu'il fallait
retenir de son intervention par Libération.
Venu débattre avec
l’économiste Jean-Paul Fitoussi au Forum Eco, le ministre du
Travail, de l’Emploi et de la Formation professionnelle a précisé sa vision de
la crise de l’emploi - et de ses "solutions". Extraits.
«En France, on a toujours cru qu’il fallait attendre une
meilleure conjoncture pour que le chômage baisse. On s’est
trompés. L’insupportable nous oblige à agir dans l’immédiat. Rien ne peut
être résolu si nous n’agissons pas dans l’immédiat et dans l’urgence. Mais rien
ne peut non plus être résolu très rapidement. C’est toute la difficulté. Dans
tous les cas, atteindre le plein emploi est un objectif que l’on doit se fixer,
même si je sais qu’on ne le tiendra pas en un quinquennat.»
A part un aveu d'impuissance à surmonter le chômage de masse durant le quinquennat, Michel Sapin ne nous apporte aucune solution crédible. Les emplois jeunes et les contrats de génération ne sont que des palliatifs largement insuffisants pour renouer avec le plein-emploi. Le refus obstiné de notre ministre d'envisager une réforme du partage du travail, comme le font d'autres pays, relève d'un aveuglement suicidaire pour l'économie française.
- «En France, il y a une préférence pour le
licenciement»
«Des pays comparables au nôtre ne sont pas dans notre
situation. L’Allemagne, par exemple, est dans une situation bien meilleure.
Pourquoi ? Notamment parce qu’en France, il y a une préférence pour le
licenciement. En cas de difficulté, c’est la première décision de l’entreprise.
Le dialogue social permet pourtant d’éviter cela.»
Rappelons que l'ensemble des pays européens ont vu leur temps de travail réduit de manières identiques, ce sont seulement les modalités de répartition de ce temps du travail qui les distinguent. Pour ce qui est de l'Allemagne, elle a multiplié les temps partiels et mal payés pour atteindre des records de précarité. Bref, l'Allemagne a fait baisser ses statistiques du chômage en augmentant le nombre de travailleurs pauvres. Est-ce cela que souhaite Michel Sapin pour la France ?
- «Je ne sépare pas le plein emploi du bon emploi»
«La notion de plein emploi ne doit pas être séparée de celle
de bon emploi.» Le mal-emploi, c’est «ceux ou celles qui sont en temps partiel
très faible, et leur nombre est important. Or, la qualité de l’emploi compte
beaucoup. La recherche du plein emploi ne doit pas conduire à diminuer le
nombre de bon emploi.»
On se demande si Michel Sapin a une quelconque notion de la réalité du monde du travail depuis son ministère. La "mal-emploi" n'est pas réservé aux temps partiels qui posent un problème de rémunération quand la norme salariale reste les 35h (sinon 40h selon l'Insee, durée moyenne d'un CDI à temps plein). Aujourd'hui la souffrance au travail touche 4 français sur 10 avec des problèmes dus à l’usure physique et psychique liée à l’accélération des
cadences et au surmenage intellectuel, conséquences notamment du développement des nouvelles technologies et de la productivité qui l'accompagne.
En 2011, L’OCDE a déclaré « la santé mentale comme le nouveau défit
prioritaire pour le marché du travail ». Monsieur Sapin, combien de temps allons-nous
encore ignorer un problème de société majeur avec des répercussions importantes
sur la santé, la perte de qualité, l’absentéisme, le turnover, le
burn-out ?
- «24,6% des jeunes au chômage : c’est le chiffre qui
m’inquiète le plus.»
«Je ne parle pas de Pôle Emploi uniquement de mon bureau. Je
vais dans une agence au moins une fois par semaine si ce n’est plus. Le chiffre
qui m’inquiète le plus aujourd’hui c’est celui-ci : 24,6% des jeunes de
moins de 25 ans sont au chômage. C’est un chiffre que nous n’avons jamais
connu. Sur certains territoires, on atteint plus de 50% de jeunes au chômage.»
Michel Sapin s'inquiète pour les jeunes mais son gouvernement s'apprête à faire voter une loi sur les retraites allongeant la durée de cotisation. Autrement dit le même Michel Sapin soutient une absurdité économique qui va maintenir des actifs plus longtemps sur le marché du travail alors que tant de jeunes souhaitent y rentrer. Ce sont plutôt les Français qui ont des raisons de s'inquiéter de sa politique de l'emploi.
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