Par Frédéric Lutaud
La population commence à reprendre ses esprits. Après l’émotion suscitée par les attentats du 13 Novembre, une autre musique arrive à se faire entendre autre que celle des belligérants revanchards et sécuritaires. Le terrorisme djihadiste ne serait pas le simple produit d’un islam même « radical », alimenté par un État islamiste en guerre contre notre mode de vie occidental. Les principaux spécialistes de la question sont unanimes : les djihadistes lisent peu ou pas le Coran. « Aucun de ceux qui sont intervenus sur le sol français ne sont passés par une formation théologique de fond ou par une intensification progressive de la pratique religieuse ». La religion n’est qu’un prétexte à leur radicalisation. La plupart ne sont pas d’origine musulmane, mais issus d’une « jeunesse déclassée qui se sent rejetée, marginalisée, victimisée ». Une génération en rupture de ban prête à déverser la haine que lui inspire l’humiliation d’une vie précaire et sans avenir. La question sociale resurgit soudain sur le devant de la scène.
Poser la question sociale c’est prendre acte de nos
responsabilités, ce dont se garde bien François Hollande. « Nous sommes en guerre », l’ennemi
c’est l’autre. Après « mon adversaire
c’est la finance », nous découvrons un nouvel ennemi intérieur : « l’Islam
radical ». Le premier avait le mérite de désigner un objectif politique,
le second se complaît dans la logique du bouc émissaire permettant d’échapper à
tout bilan. Car la « sociale démocratie » dont se revendique François
Hollande n’apporte aucune réponse ni à la crise financière, ni au repli
identitaire puisqu’elle en est le vecteur. Les mêmes causes produisant les
mêmes effets, nous assistons à l’éternel retour du même. L’histoire nous a
habitués à cette jeunesse paupérisée et dépolitisée qui rejoignait les milices
paramilitaires de l’Ordre nouveau national socialiste (qui déjà n’avaient pas
plus à voir avec le socialisme que le djihadisme de Daesh avec l’islam). Ou
encore à l'action d'un terrorisme gauchiste d’une jeunesse étudiante au marxisme mal digéré
prétendant faire le bonheur du peuple à la place du peuple. On pense aussi aux
attentats anarchistes à la fin du XIXe siècle donnant lieu à l'adoption de lois scélérates. Rien de neuf sous le ciel de la
« sociale démocratie » toujours prompte à défendre les intérêts de la
classe dominante au nom de la République parlementaire et de sa démocratie
inachevée.
Poser la question sociale, c’est refuser de contourner la
question démocratique. Qui décide de la répartition de la richesse
produite ? La “sociale démocratie” nous dit « salariés enrichissez vos entreprises, la
justice fiscale rétablira l’égalité sociale ». La démocratie sociale
répond « seul le travail crée la richesse, toute la richesse aux
salariés. Nous voulons la propriété collective de notre entreprise pour
décider démocratiquement de la production ». Il ne s’agit plus de déplacer
le curseur sur l’échelle de la répartition mais de se débarrasser d’un droit censitaire qui n’accorde le pouvoir
économique qu’à ceux qui ont les moyens de la propriété par actions.
Tandis que la moralisation d’un capitalisme prédateur par
les sociaux-démocrates s’accompagne de son lot de désolations au niveau
géopolitique (addiction aux hydrocarbures, alliances contre nature avec les
monarchies du Golfe, financements de mouvements extrémistes armées,
asservissement des populations du Sud, exploitation effrénée des ressources
naturelles…) comme au niveau national (chômage de masse, pauvreté, exclusion,
souffrance au travail, délinquance, suicide…), le désespoir grandit parmi la
population. Les esprits les plus combatifs rejoignent les luttes sociales et
les plus fragiles se laissent endoctriner par le prêt à penser nationaliste ou
religieux. Renaissent inexorablement les antagonismes de classe pour le contrôle de
la production, rejoint dès lors par la
mobilisation pour sauver le climat.
La réponse de l’exécutif, nous la connaissons. Une
déclaration de guerre pour jouer sur la fibre patriotique et exiger l’unité
nationale. Puis la mise en place d’un état d’urgence qui court-circuite la
justice et restreint les libertés publiques. Les militants de la gauche
alternative sont assignés à résidence, les syndicalistes criminalisés, les
manifestations interdites. Le social-démocrate Guy Mollet, en menant sa sale guerre
d’Algérie, n’a pas pratiqué autrement. Non, vraiment, rien de neuf sous le ciel
de la “sociale démocratie”.
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