Pierre Concialdi, chercheur à l'Institut de recherches économiques et socialesAlternatives Economiques n° 331 - janvier 2014
"En fixant, par exemple, le niveau de revenu "nécessaire" au niveau des seuils usuels de pauvreté, on définit alors la capacité contributive comme la partie du revenu qui excède ces seuils".
"En fixant, par exemple, le niveau de revenu "nécessaire" au niveau des seuils usuels de pauvreté, on définit alors la capacité contributive comme la partie du revenu qui excède ces seuils".
L'idée d'un revenu maximal fait son chemin, à juste titre.
Sur le principe, refuser cette idée revient en effet à admettre qu'un petit
groupe d'individus - à la limite un seul - pourrait accaparer l'ensemble de la
richesse produite. Ce qui aboutit à nier la possibilité pour les autres membres
de la société de disposer des ressources les plus élémentaires d'existence. On
ne peut donc guère récuser le principe d'un revenu maximal. Sauf à accepter,
voire à encourager, la croissance indéfinie des inégalités et de la pauvreté.
La limitation des écarts de salaire et la fiscalité sont les
deux principaux outils permettant de concrétiser cette idée. Les opposants à
des mesures fiscales agitent l'idée d'un prélèvement qui serait
"confiscatoire". En mobilisant ce vocabulaire, ces opposants ne font
en réalité que marteler une tautologie. Par définition, tout prélèvement ampute
en effet les revenus et en "confisque" une partie au profit de la
collectivité. Toute la question est de savoir à partir de quel niveau de revenu
s'effectue ce prélèvement et si cet effort est également réparti.
Résultats ? Avec le système d'imposition actuel,
l'effort contributif diminue tout au long de l'échelle des revenus. Pour les
5 % de ménages aux plus hauts revenus, il est inférieur d'environ
20 % au taux d'effort médian (celui au-dessus duquel se situe la moitié
des contribuables). Ce résultat se confirme même pour le millième le plus riche
des contribuables. Qu'aurait apporté la surtaxe temporaire de 75 % sur les
très hauts revenus envisagée par le gouvernement, puis censurée par le Conseil
constitutionnel ? Elle aurait simplement porté l'effort contributif de ces
très hauts revenus à peu près au niveau de la médiane, rétablissant ainsi
temporairement un minimum d'égalité.
Quant aux inégalités de salaire, il n'existe aucun fondement
économique aux écarts énormes observés aujourd'hui ni encore moins à leur
croissance depuis trente ans. L'argument de la fuite des "talents"
n'est pas justifié. A supposer même qu'il ait une vague réalité, on peut
fortement douter de la pertinence de ces "talents" pour bâtir l'économie
qui permettra d'affronter les défis écologiques et sociaux de notre siècle.
NOTES
(1) "Les
"très hauts" revenus : un effort contributif bien plus faible
que la moyenne", La revue de l'Ires n° 77, pp. 79-105.
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