En déclarant que « l'offre crée la demande », le président
français a clairement fait référence aux théories controversées de
Jean-Baptiste Say, un des fondateurs de l'économie classique.
Slate.fr 17/01/2014
Slate.fr 17/01/2014
La conférence de presse tenue par François Hollande mardi 14
janvier, résolument axée sur
l'offre et donc sur la production et l'amélioration de la
productivité des entreprises, a entraîné de nombreuses réactions politiques.
Jean-Luc Mélenchon y a vu un « coup de
barre à droite » violent et un discours néolibéral, tandis que les
représentants du centre et de la droite ont tantôt salué les
intentions du président, tantôt regretté
qu'il ait pris 18 mois pour affirmer une telle ligne politique.
Mais le président français a aussi déclenché un débat
international chez les économistes, toujours ravis d'analyser les discours
politiques à l'aune des grands théoriciens de leur discipline. Un billet en
particulier a beaucoup fait réagir, celui de Francesco Saraceno, chercheur et
professeur de macroéconomie italien vivant en France et bloguant en anglais,
intitulé « Jean-Baptiste
Hollande ».
On comprend mieux la colère de Jean-Luc Mélenchon: le
président socialiste aurait donc choisi son camp dans le débat centenaire
entre, pour résumer, la théorie libérale, axée sur l'offre (les entreprises) et
traditionnellement de droite, défendue entre autres par Jean-Baptiste Say, et
la théorie keynésienne, axée sur la demande (grands investissements de l'Etat,
pouvoir d'achat) et traditionnellement de gauche.
François Hollande avait vu venir les cris de trahison et
s'est empressé dans son discours de souligner que concentrer les efforts sur la
production en réduisant les charges sociales des entreprises n'était pas«contradictoire
avec la demande». En vain.
Paul Krugman, prix Nobel d'économie 2008, éditorialiste star
du New York Times et une des voix keynésiennes les plus influentes du monde,
s'est fendu non pas d'un mais de deux articles pour critiquer l'influence de
Jean-Baptiste Say —dont il a récemment comparé les idées à des « cafards » (on
peut les chasser, elles reviennent quand-même) sur le discours d'Hollande. Il y
crie littéralement au « scandale en France »:
« Ce qui est choquant, c'est qu'il ait épousé des doctrines
de droite discréditées. [...] M. Hollande, en annonçant son intention de
réduire les charges des entreprises tout en diminuant les dépenses (sans plus
de détails) pour en supporter le coût, a déclaré "C'est sur l'offre qu'il
faut agir" et a affirmé que "l'offre crée même la demande".
[...] Ce n'est simplement pas vrai [...]. Tout montre que la France a plein de
ressources productives, tant en travail qu'en capital, qui sont à l'arrêt parce
que la demande est inadéquate. »
Le chercheur irlandais Kevin O'Rourke écrit lui sur
le blog The Irish Economy :
«Démonter les arguments de Say par ces temps est trop
facile, laissons donc ça de côté. Le plus alarmant est ce que cela nous dit de
la gauche européenne : à toutes fins utiles, il n'y en a plus dans la plupart
des pays. »
Au-delà de l'affrontement purement idéologique, Francesco
Saraceno a voulu savoir si la baisse des charges pouvait vraiment
relancer l'activité des entreprises et s'est plongé dans les statistiques de
l'Insee, qui demande depuis 1991 aux patrons français si leurs difficultés sont
plus liées à la demande ou à l'offre. Résultat: depuis le début de la crise,
les problèmes des entreprises françaises sont davantage attribuables à la
demande qu'à l'offre, les problèmes liés à celle-ci ayant «seulement» connu
deux pics en 2008 et 2011.
L'autre grande annonce d'Hollande, celle de la réduction des
dépenses publiques, a elle aussi donné lieu à une controverse. Dans son article
consécutif au discours, le New York Times a écrit que les «experts
économiques» étaient «satisfaits que M. Hollande ait finalement
semblé vouloir enfin s'attaquer au chômage inéluctable de la France» en
citant notamment Daniel Gros, directeur du think-tank Center for European
Policy Studies.
Réponse
immédiate du Center for Economic and Policy Research, un think-tank
proche des démocrates américains:
«Vraiment? Réduire les dépenses alors que l'économie
française est toujours loin du plein-emploi est considéré comme une mesure en
faveur de l'emploi par des experts économiques? Ces experts ont-ils des preuves
pour contredire la désormais
vaste documentation sur le sujet, donc une bonne partie est
produite par le Fonds
monétaire international, qui montre que les réductions de dépenses
font baisser la croissance et augmenter le chômage?»
Il faudra attendre plusieurs mois, voire plusieurs années,
pour savoir si la politique de l'offre de François Hollande marchera, ou si
comme le prévoit Francesco Saraceno, elle n'aura aucun effet. En attendant, les
économistes keynésiens du monde entier risquent de ne rien lui épargner.
Le scandale , ce n'est pas le scooter, c'est la trahison de FH à ses engagements de campagne: mais pourquoi cet homme qu'on dit intelligent , informé sur les questions économiques s'obstine-t-il à en appeler à la croissance comme un vulgaire DSK??
RépondreSupprimerSCANDALE ; ça suffit, je voterai Nouvelle Donne