Il était 16 h 30 (heure de Paris), lundi 27 janvier, soit un peu
moins de deux heures avant la publication officielle des chiffres du chômage,
quand la question a été posée à François Hollande. « Je
ne connais pas le chiffre qui va être publié »,
a, contre toute évidence, assuré le président de la République, qui achevait sa
conférence de presse avec son homologue, Abdullah Gül, au premier jour de sa
visite d'Etat en Turquie.
Mais, preuve de l'importance de l'enjeu, il a tout de même tenu à répondre : « La
seule conclusion qu'il convient de tirer,
c'est que plus que jamais, le pacte de responsabilité devient un devoir qui
engage tout le gouvernement », a-t-il commenté.
Le président de la République a implicitement convenu que
les emplois aidés – contrats de génération et emplois d'avenir –
n'avaient pas suffi, eu égard à la faiblesse du taux de croissance. « S'il
n'y a pas de croissance forte, il n'y aura pas de diminution du chômage »,
a poursuivi M. Hollande qui, en une forme de nouvelle promesse, a assuré depuis
Ankara que « les allégements de cotisations seront strictement
respectés ».
UN REVERS MAJEUR
Politiquement, l'on voit bien quelle raison le pousse
aujourd'hui à procéder ainsi.Attirer l'attention
sur une nouvelle promesse est une habile façon de faire oublier
un pari perdu. Mais il n'est pas sûr que le chef de l'Etat y parvienne. Pour
lui, les chiffres annoncés lundi par Pôle Emploi et le ministère de l'emploi constituent, quoi qu'il en
dise, un revers majeur.
D'abord, ils mettent en lumière son impuissance. Inverser la
courbe du chômage avant la fin de 2013 n'était pas un objectif parmi d'autres.
C'était devenu l'engagement numéro un du président de la République. S'il
l'avait atteint, cela aurait été pour lui une victoire décisive. Un élément
central pour redorer sa
crédibilité. Tout son discours sur la confiance aurait été écouté d'une autre
oreille.« Il avait finalement eu raison d'y croire »,
aurait-on dit. Le fait d'avoir suscité
le scepticisme pendant des mois sur la courbe du chômage l'aurait grandement
aidé à inverser la
courbe des sondages. « Avoir raison
avant tout le monde est un grand tort », disait Edgar Faure. Dans son cas, cela
aurait été l'inverse. Les Français lui auraient su gré d'y avoir cru
contre toute évidence.
Mais le pari étant perdu, c'est la crédibilité même du chef
de l'Etat, déjà sérieusement mise en doute, qui s'écorne à nouveau un peu plus. Or le
moment est particulièrement mal venu. Avec son « pacte de responsabilité »,
François Hollande tient aujourd'hui un discours plus volontariste que jamais.
Dès lors, comment donner crédit
au volontarisme quand la volonté politique est ainsi prise en défaut ?
PARADOXE
Seconde conséquence des chiffres du chômage publiés lundi :
l'impossibilité qui est désormais celle du chef de l'Etat, et de son
gouvernement en général, de sefixer des
échéances précises. Donner une
date butoir pour l'inversion de la courbe du chômage s'est révélé être un
piège. Désormais, quel crédit pourra-t-onaccorder aux
prévisions de croissance ou à d'autres objectifs chiffrés et datés ?
A partir de
maintenant, c'est toute une façon de communiquer qui
se trouve mise à mal. Celle qui conduisit François Hollande à promettre de ramener le
déficit public à 3 % en 2013 et à tabler sur
une croissance de 2 % en 2017. C'est tout le paradoxe : au moment où le chef de
l'Etat clarifie sa politique, il est contraint d'êtreplus
flou sur les objectifs qu'il se fixe. Un conseiller de
l'Elysée le reconnaissait lundi soir : « Il n'y aura plus de nouvel
objectif daté. Mais j'espère tout de même que le chômage baissera en mars ou avril,
à la suite de l'effet d'annonce du pacte. »
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