Par Frédéric Lutaud, membre du Bureau national de la motion4
Pour ceux qui en doutaient encore, François Hollande a
tourné officiellement le dos à tout projet de transformation sociale. Après le
krach boursier de 2008, la communauté internationale avait déclaré unanimement
« plus jamais ça ! Il faut changer de modèle développement ». Le
Président des Français épouse maintenant sans complexe les thèses libérales qui
ont discréditées la droite. Son « pacte de responsabilité » nous
propose de produire plus pour travailler plus, la surenchère compétitive, la
poursuite de l’allègement du coût du travail et, bien sûr, la réduction des
dépenses publiques. En souscrivant aux revendications du patronat, son « gagnant/gagnant »
se limite à un « observatoire des contreparties ». Nous savons ce qu’il en
est de la « moralisation du capitalisme », nous savons ce qu’il en sera
d’une politique sans mesure contraignante pour le capital.
Ses déclarations tournent le dos aux principaux enjeux de
notre époque. D’abord, le discours formaté qui voit dans la croissance l’alpha et l’oméga de toute politique économique en pleine crise écologique est suicidaire.
Aucune percée technologique majeure ne vient confirmer la possibilité d’une
« croissance verte » qui soulagerait la pression sur les ressources
naturelles.
Ensuite, vient l’affirmation effarante comme quoi « l’offre
crée la demande ». Celle-ci est notoirement réfutée par n’importe quel
économiste compétent. François Hollande a choisi de devenir la risée des intellectuels du monde entier pour rassurer les marchés financiers qui ont pourtant conduit à
la récente faillite du système.
La suite n’a aucune raison de nous surprendre. Une
rhétorique de droite assimilant « charges » et « cotisations
sociales » continue de justifier la nécessité de baisser « le coût du
travail ». La vérité, c’est qu’il n’y a pas de problème de charges mais un
problème de marges. Les marges des petites et moyennes entreprises sont
confisquées par leurs donneurs d’ordres. Les grands groupes captent depuis 30
ans l’essentiel des gains de productivité pour rémunérer leurs actionnaires. En
2013, ce sont 299 milliards d’euros versés au capital pour seulement 197
milliards d’investissements. Dès lors, le capitalisme actionnarial prélève sur
l’économie réelle (en dividendes et rachat d’actions) plus qu’il n’apporte de
financement aux entreprises. Le problème, c’est le coût du capital, pas celui
du travail. La compétitivité est un miroir aux alouettes pour mieux soumettre
les travailleurs à la concurrence généralisée dans une Europe où doit s’organiser
la coopération et l’harmonisation des protections sociales.
Au d'une Europe sociale, nous assistons à la fuite en avant dans le
dumping fiscal intra-européen. La suppression des cotisations familiales
pour les entreprises d’ici 2017 est un nouveau coup de canif dans notre contrat
social républicain. Qu’avons nous obtenu en échange des 200 milliards
d’exonérations fiscales aux entreprises ? : le chômage de masse.
Une politique de gauche doit redonner du pouvoir d’achat aux
Français et investir massivement dans la transition écologique afin de relancer
la demande et permettre une montée en gamme de la production débouchant sur une
consommation écologiquement responsable, mais François Hollande poursuit sa
distribution de cadeaux fiscaux et la réduction les dépenses publiques. C’est
le monde à l’envers.
« Nous n’avons pas encore gagné la bataille pour
l’emploi » semblent être les paroles les plus sensées de notre président. Malheureusement,
selon lui, la croissance crée l’emploi. Nouvelle erreur de diagnostic. La
principale cause de réduction de l’emploi est l’amélioration de la productivité
qui représente 65% des pertes d’emploi depuis 2000. Il n’y a d’autre solution
au chômage de masse qu’une répartition équitable du volume d’heures travaillées
car celui-ci a diminué de 10% en 60 ans de croissance tandis que la population
a augmenté de 23%. Il faut diminuer le temps de travail. Pour que les temps
partiels subits aient la possibilité de travailler plus, il faut que ceux qui
travaillent trop puissent travailler moins, ce qui permettra aussi d’intégrer les
exclus du marché du travail.
Les orientations mercantiles et productivistes de François
Hollande ne pourront qu’aggraver la situation. La course à une croissance aveugle
dispense de s’interroger sur la répartition de la richesse existante et sur l’urgence à satisfaire de nombreux besoins sociaux. Sans encadrement des hauts
salaires (depuis la crise de 2008, la rémunération moyenne des dirigeants du
CAC 40 a augmenté de 21% en moyenne) et plafonnement des dividendes, il n’y
aura aucune réduction significative des inégalités salariales et les
entreprises ne retrouveront pas leur capacité d’investissement. La semaine de 4
jours, permettant de vaincre le chômage de masse, n’a pas retenu l’attention du
gouvernement. La finance est confortée dans son monopole de la création
monétaire. Nous assistons à la démission du politique devant les intérêts du
capital. C’est la politique d’une gauche sans projet, si ce n’est le règne de
la marchandise qui réduit notre humanité au rôle de consommateur
(« l’offre crée la demande » bien sûr !). Ne nous étonnons pas dans
ces conditions d’assister à la montée du chômage et des nationalismes en Europe.
La feuille de route de François Hollande n’est ni responsable économiquement,
ni responsable écologiquement.
Entièrement d'accord , c'est une trahison de FH
RépondreSupprimerAveuglé par sa vie privée, FH nous déçoit et je voterai Nouvelle Donne