Propositions de Jean Bayard - Aujourd'hui retraité, il a achevé sa carrière
professionnelle dans une multinationale en qualité de directeur des études
financières. En 1980, il s'est intéressé à l'économie et, utilisant
essentiellement ses connaissances comptables et financières, s'est livré à des
travaux de recherche concentrés sur les comptes nationaux et effectués à partir
d'une expression mathématique (que l'on trouve dans la plupart des manuels
d'économie) démontrant l'égalité existant entre l'épargne et l'investissement.
Après avoir supporté deux chocs systémiques, le premier
provoqué par les subprimes, le deuxième par les titres souverains, le système
monétaire est en pleine crise, même si les autorités monétaires s’abstiennent
d’en convenir.
Le marché interbancaire ne fonctionne plus (Euroland) ou
très mal (ailleurs), en raison d’une dégradation de plus en plus accentuée de
la valeur de ces titres par les agences de notation. Sur ce marché, en effet,
les banques refusent d’accorder à leurs consœurs des prêts contre ces titres,
appelés aussi « collatéraux », apportés en garantie.
Les banques centrales ont dû se substituer aux marchés
interbancaires, déversant des quantités de monnaie centrale en faveur des
banques pour tentervainement de sauver le système monétaire.
Pour sauver les banques, oui, mais en vain pour sauver le
système complètement déréglé.
En vain également pour sauver l’économie de la récession,
car les deux monnaies centrale et secondaire circulent dans deux compartiments
différents, ce qui veut dire que la monnaie centrale ne peut irriguer la sphère
de l’activité de production qui ne fonctionne qu’avec de la monnaie secondaire.
Tout le système doit être remis à plat.
C’est l’objet de ce titre.
Voici deux propositions de réforme fondamentale que l'on
peut examiner :
A - La première administrée, donc plus contraignante
pour les banques, exposée ci-après.
B - La deuxième libérale mais réglementée, reprise dans
ses grandes lignes à la suite.
Qu’il s’agisse de l’une ou l’autre de ces deux propositions,
la reprise du contrôle de leur Banque centrale par les Etats devient un
impératif de gouvernance économique absolu, ce qui implique en zone Euro
la dénonciation des accords de Maastricht/Lisbonne.
A - Réforme administrée du système monétaire et bancaire,
par la séparation des activités bancaires au moyen d'une seule monnaie : la
monnaie centrale
A.1 - Préambule
Avant qu’il ne soit abrogé en 1999 aux Etats-Unis sous la
présidence de Bill Clinton (Démocrate), le Glass-Steagall Act, promulgué en
1933 après le krach de 1929, réglementait déjà la séparation des banques
d’affaires et des banques de dépôt. Il aura donc fallu 66 ans pour que le lobby
bancaire réussisse à reprendre le pouvoir monétaire total qu’il avait
alors perdu.
Tous les excès lui étant permis depuis, il ne lui aura fallu
que 8 ans (1999-2007 affaire des subprimes) pour plonger le monde entier dans
le désastre économique et financier d’une ampleur et d’une durée incomparables
à celui de 1929.
Il devient urgent et crucial pour nos gouvernants de
rétablir l’ordre monétaire sévèrement mis à mal par ceux-là même qui se
prétendent investis de la responsabilité suprême en cette matière.
La première question qui se pose, est de savoir pourquoi on
ne cherche pas à appliquer des règles qui ont fait la preuve de leur
efficacité. Ce serait trop facile, semble-t-il. Ce serait aussi et surtout
s’opposer à la toute puissance monétaire qui ne veut rien entendre dès qu’il
s’agit de restreindre son pouvoir. Les autorités monétaires mettent tout de
suite en avant les conséquences néfastes que pourrait avoir sur l’économie la
réforme projetée, ce qui s’apparente beaucoup à une certaine forme de
chantage.
Enfin, si nos hommes politiques connaissent bien la
politique, ils ne connaissent rien d'autre à la monnaie que ce que l'on a bien
voulu leur dire. Aussi, toute l’agitation dont ils font preuve actuellement
n’est que des effets de manche destinés à masquer leur incompétence.
Si l’on veut y voir clair dans le système monétaire, il faut
le considérer sur le plan macroéconomique et pour cela le bilan consolidé des
banques commerciales (créatrices de monnaie dite secondaire) nous paraît le
mieux adapté.
Il nous semble utile de donner quelques données de base sur
l’activité créatrice de monnaie des banques commerciales, données qui ne sont
pas forcément reconnues.
Si l’on examine leur bilan, les créances accordées - portées
à l’actif - correspondent à une création de monnaie secondaire contrepartie de
la mise à disposition de la monnaie en compte dépôt à vue (DAV) des Agents Non
Bancaires (ANB), portée au passif. Rares sont ceux qui s’opposent à cette règle
généralement admise.
Les créances sur l’Etat auxquelles la banque souscrit ont le
même effet de création de monnaie secondaire, mais de manière indirecte, c’est
pourquoi nous semble-t-il elle passe inaperçue. A la souscription, la banque se
procure la monnaie centrale qu’elle remet au Trésor Public, monnaie qu’elle
récupère quand l’Etat procède à ses dépenses ; puis en créditant le compte
correspondant des ANB (salariés, fournisseurs et autres) elle crée la monnaie
secondaire, la seule en usage entre eux.
C’est ici que surgit la difficulté de compréhension
tellement les esprits sont pétris de théories. La monnaie reçue en DAV emprunte
le chemin des transactions d’une banque à une autre, ou s’il n’y avait qu’une
banque d’un compte à un autre. Au cours de sa circulation les ANB décident d'en
porter une partie en dépôt à terme (DAT). C’est toujours de la monnaie mais elle
s’arrête de circuler. La banque ne peut pas en disposer sans
l’autorisation du déposant. On remarquera qu’elle figure toujours au passif du
bilan de la banque dans les DAT à moins ou plus de 2 ans, séparation faite
dans les comptes des banques.
Il s’agit là d’une erreur d’une portée considérable car
cette masse monétaire ralentit la marche de l’activité de production,
puisqu’elle est gelée par le système. Elle ne fait l’objet d’aucune
régulation.
La monnaie scripturale est une monnaie d’écritures comptables
et sa traçabilité est garantie par le fait même. Chaque transaction est
enregistrée, comptabilisée. Si la banque prêtait les DAT, ils disparaîtraient
de son bilan. On cherchera en vain l'écriture comptable qui constaterait le
transfert, il n'y en a pas.
On ne peut pas par un acte de foi prétendre que cette
monnaie est utilisée par les banques.
La confusion est née vraisemblablement des établissements
financiers, non créateurs de monnaie, qu’étaient les CCP et les Caisses
d’épargne avant leur changement de statut. Les fonds des CCP étaient
transférés au Trésor Public qui n’a pas manqué de les utiliser. C’était le but
de l’opération. Quand les CCP avaient des dépenses à honorer, le TP les payait
pour son compte. Ainsi, disposait-il de toute la monnaie des comptes chèques
postaux - surtout l’épargne - pour ses propres besoins financiers.
A fin 1996, le solde des comptes réciproques, d’une part au
passif du bilan du Trésor Public au compte « Dépôts des services
financiers de La Poste » et d’autre part à l’actif du bilan de La Poste au
compte « Dépôts au Trésor », s’élevait à 176,8 milliards de francs.
(Source Banque de France - Bulletin Hors Série 1996). C'est, semble-t-il,
la dernière publication.
La banque tire sur ses caisses. L’établissement financier
tire sur sa banque.
Pour qu’elle soit prêtée, la monnaie doit se trouver dans
une banque extérieure : la Banque centrale par exemple. Mais alors, ne
circulerait plus que de la monnaie centrale et la banque deviendrait un simple
établissement financier. Elle ne créerait plus de monnaie secondaire. C’est
l’objet de ce billet.
A.2 - Bilan consolidé des banques commerciales, modèle
macroéconomique (figure 1) avant réforme
Le modèle ci-dessous (Figure 1) présente un bilan consolidé des banques commerciales avant la réforme proposée. Il a été construit sur la base de données relevées dans le Bulletin mensuel de la BCE. Il s’agit de chiffres approximatifs mais les ordres de grandeurs nous paraissent bons. Ils sont approximatifs, primo, parce qu’ils sont extraits du bilan consolidé des IFM (Institutions Financiers et Monétaires) à fin 2011, lequel fait l’amalgame des banques de dépôts, créatrices de monnaie, avec les établissements financiers qui n’ont d’autre pouvoir que celui de la faire circuler. Ils sont approximatifs, secundo, parce que les rubriques ne sont pas classées selon un plan correspondant à notre démarche.
Ce modèle reprend les principales rubriques du bilan d’une
banque commerciale.
Les Réserves Obligatoires (RO) sont calculées ici à hauteur
de 2% des DAV+DAT ≤ 2 ans. Ce qui nous permet d’avancer que la Banque centrale
considère ces DAT comme de la monnaie, puisqu’ils sont compris dans leur
assiette. A titre d’information, les DAT à plus de 2 ans sont exclus de la
masse M3. Ils ne sont nulle part dans les statistiques !
Il est bon de savoir à présent comment les banques de dépôt
se procurent la monnaie centrale pour alimenter leurs RO et se fournir en
monnaie fiduciaire auprès de l’Institut d’émission. Il ne faut pas croire
qu’elles transfèrent une fraction des dépôts qu’elles détiennent - comme le
laisse supposer la théorie du multiplicateur -, elles ne peuvent pas en
disposer comme cela a été dit plus haut. Elles cèdent ou remettent en pension
des titres dits éligibles - généralement souverains et de grandes sociétés
- qui leur ont servi à créer la monnaie secondaire.
Créances et titres contre monnaie centrale. Mais aussi
devises contre monnaie centrale.
C’est sur la base de ce principe d’échanges que nous allons
bâtir notre modèle de séparation des activités de dépôt et d’affaire.
Figure 1
ACTIF
|
PASSIF
|
||
Banque centrale
- Compte courant (DAV) |
1,2
|
||
Concours à l'économie
- Créances sur la clientèle - Actifs financiers (Créances sur l’Etat et les entreprises) |
84,3
|
Dettes envers la clientèle
- DAV
- DAT à ≤ 2 ans - DAT à > 2 ans |
31,7
30,5 21,3 |
Activité propre de la banque
- Instruments financiers
- Actifs propres
|
14,5
|
Activité propre de la banque
- Instruments financiers - Emprunts obligataires et subordonnés - Passifs propres - Capitaux et réserves |
16,5
|
Total
|
100,0
|
Total
|
100,0
|
Nous allons à présent séparer les activités bancaires de
dépôt et d’investissement ou d’affaires, de la manière la plus simple qu’il
soit. Que l’on en juge.
Une seule monnaie circulerait dorénavant, la monnaie centrale. A ne pas confondre avec ce que l’on appelle le 100% monnaie, étudié plus bas.
Les concours à l’économie seraient exclusivement pris en charge par la Banque centrale comme le montre la figure 2, ci-après du bilan consolidé après la réforme.
Une seule monnaie circulerait dorénavant, la monnaie centrale. A ne pas confondre avec ce que l’on appelle le 100% monnaie, étudié plus bas.
Les concours à l’économie seraient exclusivement pris en charge par la Banque centrale comme le montre la figure 2, ci-après du bilan consolidé après la réforme.
A.3 - Bilan consolidé des banques commerciales, modèle
macroéconomique (figure 2) après réforme
Le modèle ci-dessous présente donc un
bilan consolidé des banques commerciales après la réforme proposée.
Il reprend et met en nouvelle forme les données relevées dans le Bulletin
mensuel de la BCE à fin 2011, sous les réserves exprimées.
Figure 2
ACTIF
|
PASSIF
|
||
Banque centrale
- DAV pour compte clientèle
- DAV pour compte propre |
84,3
1,2 |
||
Dettes envers la clientèle
- DAV
- DAT à ≤ 2 ans - DAT à > 2 ans |
31,7
30,5 21,3 |
||
Activité propre de la banque
- Instruments financiers
- Actifs propres
|
14,5
|
Activité propre de la banque
- Instruments financiers - Emprunts obligataires et subordonnés - Passifs propres - Capitaux et réserves |
16,5
|
Total
|
100,0
|
Total
|
100,0
|
Chaque banque disposerait de 2 comptes distincts à
l’Institut d’émission dont le nom généralise la fonction. L’un pour les
opérations avec la clientèle sans exception, l’autre exclusivement réservé à
ses transactions propres. Le traitement en compensation devrait isoler
évidemment la nature des opérations vers l’un ou l’autre compte, ce qui ne
soulève aucune difficulté.
La Banque centrale décide d’accorder les crédits à
l’économie à l’Etat, d’une part, et sur la demande des banques commerciales
pour ce qui concerne les ANF et elles-mêmes, d’autre part. Elle contrôle l’activité
des banques par les crédits qu’elle leur consent. Les banques ne peuvent plus
émettre de monnaie.
Il n’existe plus de monnaie secondaire. La seule monnaie
ayant cours légal est la monnaie centrale, fiduciaire et scripturale.
L’Etat peut reprendre le contrôle de sa Banque centrale,
selon ce que pourraient en décider les Chambres des représentants.
Les banques devraient régulièrement communiquer la masse des
DAT épargnés, afin de permettre la régulation monétaire nécessitée par le
blocage de l’épargne en banque. Le TP pourrait être habilité à opérer cette
régulation sur instructions données par le gouvernement responsable de la
politique monétaire au plus haut niveau, la Banque centrale devenant le bras
exécutif.
La banque ne tire plus sur ses caisses, mais comme tout
établissement financier qu’elle devient, elle tire sur sa Banque
centrale.
Bien qu’il soit possible, par le fait même, pour les banques
d’utiliser l’épargne disponible à leur compte à la BC (compte extérieur à
elles-mêmes), il serait préférable de ne pas les y autoriser.
La Banque centrale, seul pouvoir de décision en la matière,
accorderait les crédits demandés :
- par les banques pour le compte des ANB,
- par les banques pour leur propre compte,
selon la procédure générale nouvellement instaurée.
Le système est alors complètement bouclé et sécurisé.
A.4 - Observations sur le 100% monnaie
C'est Irving Fisher qui, le premier, a introduit dans les années 30 le concept du "100% money", repris par les 2 prix Nobel d'économie : Maurice Allais et Milton Friedman, puis récemment par Christian Gomez, disciple d'Allais.
Ce concept prévoit que la création de monnaie par les
banques doive être couverte par une provision égale à 100%
de monnaie en compte à la banque centrale. Ceci afin que les banques
privées ne puissent émettre plus de monnaie qu'elles n'en disposeraient à
l'Institut d'émission, celui-ci devant avoir de fait le contrôle absolu de
l'émission monétaire. On ne sait pas si les 100% s'appliquent aux DAV ou
autrement.
Pour son application, les banques seraient scindées en 3
catégories distinctes (Maurice Allais), en fonction d'activités spécifiques :
les banques de prêts, les banques de dépôts et les banques d'affaires.
Dans sa proposition de réforme du système de crédit, voici
ce que dit Maurice Allais :
Cette réforme doit s’appuyer sur deux principes tout à fait
fondamentaux :
La création monétaire doit relever de l'Etat et de l'Etat
seul. Toute création monétaire autre que la monnaie de base par la Banque
centrale doit être rendue impossible, de manière que disparaissent les « faux
droits » résultant actuellement de la création de monnaie bancaire.
Tout financement d'investissement à un terme donné doit être
assuré par des emprunts à des termes plus longs, ou tout au moins de même
terme.
S’il n'y a rien à dire sur les principes énoncés, il y a
beaucoup à dire sur leur application qui repose sur une erreur invraisemblable
d’interprétation, quand il dit :
Par l'utilisation des dépôts à vue et à court terme de ses
déposants, l'activité d'une banque aboutit à financer des investissements à
moyen ou long terme correspondant aux emprunts qu'elle a consentis à ses
clients. Cette activité repose ainsi sur l'échange de promesses de payer à un
terme donné de la banque contre des promesses de payer à des termes plus
éloignés des clients moyennant le paiement d'intérêts.
L’erreur est de dire que la banque utilise les dépôts à vue
et à terme de ses déposants. Et puis, M. Allais oublie ou perd de vue que les
(emprunts, lapsus ?) prêts que la banque a consentis à ses clients sont
les créances à l’origine de l’émission monétaire, et non le contraire.
On a vu qu’à l’émission, les crédits font les dépôts à vue
DAV, et après circulation (virement des DAV aux DAT) ils font les dépôts à vue
DAV + à terme DAT.
Maurice Allais et ses disciples supposeraient que les dépôts
à terme sont utilisés par la banque pour être prêtés, ce qui est contestable.
Cette épargne bancaire aurait disparu des écrans de contrôle (bilan)
mystérieusement prêtée par le système. Il en serait tout autrement si les fonds
étaient en compte dans une autre banque, ce qui n’est pas le cas.
Si l’on comprend bien, le 100% monnaie serait bâti sur le
système des réserves fractionnaires. Il suffirait de relever les réserves
obligatoires de 1% (actuellement en Euroland) à 100%, sur la base des
seuls DAV, sauf erreur, l’existence des DAT étant zappée. Rien ne changerait
puisque la monnaie secondaire aurait toujours cours, sauf à la supprimer (cf.
figure 2)
Les réserves obligatoires (fractionnaires) supposeraient
selon certains qu’une fraction des dépôts serait prélevée sur les comptes comme
s’il s’agissait de monnaie fiduciaire afin de les garantir contre les risques
liés à une mauvaise utilisation (mauvais placement) de ces dépôts par les banques.
Encore une fois, la banque ne peut pas utiliser les dépôts de la clientèle que
ce soit les DAV ou les DAT.
Pour en être totalement convaincu, voyons ce que nous dit la
Banque de France (Bulletin du mois d'octobre 1999), à propos des établissements
financiers, dits en banque, c'est-à-dire structurellement endettés envers la
Banque centrale :
« La création monétaire de ces établissements, qui
intervient lorsqu'ils prêtent à leurs clients, exige une création
monétaire postérieure par la banque centrale lors de leur
refinancement ».
C'est très clair pour celles qui sont "en banque".
Pour les autres "hors banque", leurs disponibilités en monnaie
centrale leur permettent de remplir le moment venu leurs obligations en matière
de réserves obligatoires.
Il ne fait aucun doute que les banques doivent se procurer
la monnaie centrale pour répondre à leurs obligations en matière de RO et dans
ce but le seul moyen existant est la mise en pension ou la cession de titres
éligibles. Nulle part il est question de transférer de la monnaie secondaire
(celle émise par les banques elles-mêmes) à l’Institut d’émission.
En substance, il semble bien que la réforme proposée par le
100% monnaie ne puisse s’appliquer sur la base des données avancées par leurs
promoteurs.
Pour réaliser l’idée maîtresse de Maurice Allais, reprise
ci-dessous,
La création monétaire doit relever de l'Etat et de l'Etat
seul. Toute création monétaire autre que la monnaie de base par la Banque
centrale doit être rendue impossible, de manière que disparaissent les « faux
droits » résultant actuellement de la création de monnaie bancaire.
la seule solution paraît bien être celle proposée au
chapitre A.3 au-dessus.
B - Réforme libérale du système monétaire et bancaire, avec
maintien des deux monnaies : centrale et secondaire
B.1 - Concours à l’économie.
On peut tout d'abord répartir la distribution des concours à
l'économie selon les règles suivantes :
a) - la banque centrale fournit exclusivement les
besoins de l'Etat en monnaie dite permanente, c’est-à-dire sans intérêt ni
échéance de remboursement, sachant que par ailleurs les taxes et impôts
couvrent les frais de fonctionnement.
Cette monnaie permanente est destinée à financer, d’une part
les investissements publics nets d’amortissements et d’autre part la régulation
monétaire du pays, instrument indispensable de la gouvernance
économique. Dans l’immédiat, elle pourrait être fixée à hauteur des dépôts
à terme en banque (DAT) qu’elle aurait pour premier objectif de réactiver par
régulation.
b) - les banques de dépôts, créatrices de monnaie
secondaire, fournissent les besoins financiers des agents non bancaires
(ménages, entreprises et établissements de crédit non créateurs de monnaie),
les risques d'insolvabilité étant couverts dans des conditions examinées
ci-après.
L'Etat doit commencer par réviser la réglementation bancaire
en donnant la priorité à la réforme du ratio de solvabilité des banques et
autres établissements de crédit, appelé aussi ratio Cooke, modifié Bâle II et
III, qui est à l'origine des défaillances du système.
Les paramètres de ce ratio, doivent être profondément
remaniés. Les concours à l'économie doivent être éliminés de ces paramètres,
pour ne viser que les seules opérations des banques pour propre compte.
Les concours à l'économie seraient encadrés par la
couverture du risque d'insolvabilité, à partager entre la Banque centrale d'une
part, et les banques et autres établissements de crédit d'autre part, dans le
rapport de 90/10 par exemple, les obligeant ainsi toutes et tous à prendre
leurs responsabilités, contre rémunération naturellement. Etant précisé que la
Banque centrale donne son accord préalable à l'attribution des crédits, puisque
c'est elle qui prend la plus grande part des risques.
Le gouvernement, en charge de la politique monétaire,
détermine provisoirement un taux d'intérêt fixe pour une période de 1
an, par exemple. Dans le même temps, les banques et établissements de crédit
font payer leurs services, tous leurs services, ceci afin de préparer
la réforme monétaire et la disparition progressive des taux d'intérêt.
Actuellement, si l'on supprimait brutalement leurs produits et
charges d'intérêt, les banques seraient déficitaires car leurs charges
d'exploitation ne seraient plus alors entièrement couvertes par les produits
d’exploitation (voir pour exemple, notamment, le compte d’exploitation de la
BNP).
Afin de faciliter le recours au crédit, il serait bon qu’à
terme l'intérêt des prêts et emprunts soit supprimé et remplacé par
l'indexation à un indice approprié : celui de l'érosion monétaire, indice
calculé par un Institut de statistiques indépendant. En définitive,
l'emprunteur aurait à sa charge le coût de la couverture du risque
d'insolvabilité, d'une part, et la rémunération effective des services rendus
(gestion des dossiers et autres), d'autre part, au bénéfice de l'établissement
prêteur. L'avantage d'un tel système réside dans le fait que l'emprunteur
serait autorisé à suspendre, à faible coût, les échéances de remboursement
en cas de difficultés passagères.
Ces conditions devraient favoriser l'accès au logement pour
tous.
N'ayant plus matière à s'exercer, la spéculation sur les
variations de taux d'intérêt disparaitrait. Pas de taux d'intérêt variables =
pas de spéculation.
B.2 - Relations interbancaires
Les recommandations d'ordre technique qui suivent,
s'appliquent à chaque banque centrale nationale dans l'exercice de ses
responsabilités, pleines et entières, c'est-à-dire la maitrise du système
bancaire.
La première mesure consiste à obliger la Banque centrale à
exercer son rôle de Super-banque à la sortie de la compensation et de ne plus
se borner à servir de simple chambre d'enregistrement comptable des opérations.
Elle doit se substituer aux marchés de gré à gré et interbancaires, supprimés
pour la circonstance.
A la sortie de la compensation, ainsi qu’on l’a vu, les
positions débitrices sont égales aux positions créditrices. Les banques ne
règleraient plus leurs positions les unes vis-à-vis des autres comme c'était le
cas avant la tempête monétaire, mais vis-à-vis de l'autorité monétaire.
L'Institut d'émission porterait les positions des unes et des autres à un
compte spécifique indisponible ouvert au nom de chacune d'elles, et
fixerait un taux d'intérêt au jour le jour, en attendant la suppression des taux
et leur remplacement par une commission d'intervention. Les positions
journalières s'accumulant, ces comptes spécifiques varient quotidiennement dans
l'équilibre comptable : débit = crédit. La Super-banque fixerait les découverts
maxima autorisés jusqu'à la mise en place de la couverture du risque
d'insolvabilité visé au-dessus. Cette mesure aurait permis (si elle avait été
mise en place lorsque les titres donnés en garantie sont devenus toxiques) et
devrait permettre d’éviter l’émission de monnaie centrale en surabondance et
d’alimenter la trappe à liquidités.
Les banques doivent avoir pour
interdiction absolue de "faire passer" par la compensation
leurs opérations pour propre compte. Les banques ne doivent plus tirer sur
elles-mêmes, mais utiliser un compte de dépôt à vue ouvert à la Banque centrale
pour encaisser ou payer, soumis aux mêmes règles que tout un chacun,
c'est-à-dire approvisionné ou sur la base de lignes de crédit dûment autorisées
par elle. Avec toutefois une exception, pour des raisons pratiques : le
règlement des salaires de leur personnel et l'encaissement des intérêts et
agios de leurs clients, tous titulaires de comptes ouverts chez chacune
d'elles.
- mesure d'ordre : la banque centrale ne fait
que son travail, et
- mesure d'assainissement : les titres remis en
garantie n'ont plus lieu d'exister puisque les risques d'insolvabilité sont
couverts, et les banques sont mieux encadrées.
Cela nous donnerait en substance, deux courants monétaires
traversant les banques de dépôts (créatrices de monnaie) : les concours aux
agents non bancaires, contrôlés par le pouvoir monétaire et garantis par
l'assurance du risque d'insolvabilité, d'une part, et les opérations pour
propre compte, doublement encadrées : une première fois par le ratio de
solvabilité et une deuxième fois par le contrôle de l'utilisation des crédits
consentis aux banques par la Banque centrale, d'autre part.
Le système serait ainsi verrouillé.
Le dispositif des réserves obligatoires est aboli. La
monnaie scripturale centrale ne sert qu'aux échanges entre les titulaires d'un
compte à la Banque centrale, comme c'est le cas actuellement mais sous
son contrôle effectif.
Enfin, l’activité d’assurance serait placée dans une
structure indépendante des banques, ceci afin d’éviter ses conséquences en
matière de destruction de monnaie secondaire.
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