Par Frédéric Lutaud, membre du Bureau national pour la motion 4
Quand le Parti
socialiste choisit comme slogan pour sa campagne Européenne « Imposons une
nouvelle croissance ! », on est en droit de s’interroger sur la pertinence
d’un tel message. Où sont passer nos communicants ? Serait-ce cette
croissance que Sarkozy se proposait d’aller chercher « avec les dents » ?
Ou bien cet indicateur de richesse condamné par la commission Stiglitz,
considérant que « ceux qui s’efforcent de guider nos économies et nos
sociétés sont dans la même situation que celle de pilotes qui chercheraient à
maintenir le cap sans avoir de boussole fiable ». Quelle pertinence y a
t’il à placer notre campagne européenne sous le signe de la croissance en
pleine crise écologique ? Une « nouvelle » croissance du PIB,
dite « durable », épargnera-t-elle l’épuisement des ressources
naturelles ? Cette illusion est dénoncée par toutes les études
scientifiques. Finalement, nous avons moins besoin de communicants que d’une
direction du Parti socialiste avec une vision claire et ambitieuse du projet
Européen. Quand Christophe Borgel, directeur de la campagne, déclare au Bureau
national du Parti socialiste qu’il ne faut pas « un message trop compliqué
pour les français », nous ne pensons que c'est ainsi que nous pourrons convaincre nos concitoyens. Et le choix d’une « nouvelle croissance » incarne un manque de vision. Comment mobiliser les français avec un slogan
usé jusqu’à la corde, qui plus est, en complète contradiction avec les enjeux
de notre époque ? Pourquoi courir après une « nouvelle croissance »
quand la solution se trouve dans une meilleure répartition de la richesse
produite et dans l’exploitation sobre et responsable des matières premières ? Notre
slogan de campagne devrait plutôt porter, haut et fort, un modèle de
développement européen qui prend ses distances avec la croissance.
Un slogan en décalage avec notre époque |
Cela
s’avère d’autant plus navrant que le projet défendu par notre candidat allemand à la Commission européenne Martin Schulz ne manque pas d’ambition. Le Parti socialiste dispose largement de quoi s’inspirer. Certes
on ne parle pas d’une convergence Européenne pour la diminution du temps de
travail comme le demande la Confédération Européenne des Syndicats. Ni d’un
impôt fédéral sur les dividendes des sociétés qui pourrait financer le budget
Européen. Ni encore de la proposition de passer à un système entièrement
parlementaire qui permettrait aux députés européens de débattre
vraiment et de trancher sans qu’un pays ne risque d’être mis en minorité. Mais
la feuille de route reste progressiste et offensive : refuser l’austérité avec
révision du pacte de stabilité pour favoriser les investissements
publics ; stop au dumping social avec harmonisation des droits sociaux et
création d’une inspection du travail européenne ; instauration d’un
salaire minimum pour garantir à tous une vie décente et mettre fin au scandale
des travailleurs pauvres ; les banques doivent payer pour les banques, pas
les contribuables ; taxation des transactions financières et abolition du secret
bancaire avec sanctions lourdes infligées aux contrevenants à la lutte contre
l’évasion fiscale. Nous trouvons même un traité social européen qui garantira à
tous les droits du travail, le niveau de protection sociale, le droit syndical
et le principe de la clause la plus favorable aux salariés.
A lire
nos argumentaires de campagne, les français devraient voter en masse pour les
candidats socialistes le 25 mai. Alors pourquoi les sondages sont-ils en France
si calamiteux ? Peut-être parce que le gouvernement fait pour la France exactement
l’inverse de ce que nous nous proposons de faire pour l’Europe ?
Nous
refusons l’austérité en Europe quand le gouvernement impose 50 milliards de
coupe budgétaire. Nous voulons stopper le dumping intra-européen mais le
gouvernement baisse le coût du travail obligeant nos partenaires économiques à s’aligner.
Nous demandons la création d’une inspection du travail européenne mais la loi
Sapin organise la casse de l’inspection du travail français. Nous souhaitons un
traité européen qui garantira, à tous, le meilleur niveau de protection sociale
mais le gouvernement allonge la durée des cotisations retraite quand
l’Allemagne la réduit. Quant à la loi sur les transactions financières, le
gouvernement français n’a cessé de réduire à tout prix l’ambition de la TTF
européenne, illustrant ainsi sa soumission aux intérêts des grandes banques
françaises. Aussi, ne suffit-il pas de parler Europe, mais de montrer l’exemple.
Tant
que nous accorderons pas nos paroles et nos actes, le Premier ministre Manuel
Valls n’aura qu’une chose à « assumer », une nouvelle débâcle de notre
parti aux Européennes. Avec en prime des militants et un peuple de gauche
cultivant un profond ressentiment pour sa politique. Nous sommes de plus en
plus à penser au Parti socialiste que le gouvernement ne remplit pas ses
engagements du Bourget et il est regrettable que la campagne Européenne puisse
en faire les frais.
La motion4 invite tout le monde à voter et faire voter le
25 mai pour les listes socialistes en espérant que les électeurs ne nous
fassent pas trop grief de nos contradictions.
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