Les politiques actuelles ne marchent plus. Il faut en finir
avec cette idée que sans croissance rien n’est possible, affirme l’économiste
Jean Gadrey, membre du comité de soutien du parti Nouvelle Donne. Nul besoin
d’attendre une hypothétique croissance pour partager le travail, réduire la
pauvreté et la précarité, ou taxer les transactions financières.
Il est temps d’en finir avec cette idée du candidat François
Hollande en 2012, reprise sans cesse par le Président, selon laquelle
« sans croissance, il n’y a pas de redressement économique, pas de
création d’emploi » et même pas de progrès social possible. Cette idée
nous condamne à l’impuissance politique.
D’innombrables travaux montrent que, dans le groupe des pays
les plus « riches » au sens usuel, les indicateurs de développement
humain, de bien vivre, de santé et d’éducation, de délits et violences… n’ont
plus aucun rapport avec le niveau du PIB par habitant. Les « politiques de
croissance » ne marchent plus, elles ont même des effets pervers. Il faut
des politiques de civilisation, d’ailleurs bien plus riches en emplois.
De plus en plus d’économistes estiment que, d’une part, la
croissance ne reviendra pas, ou seulement à des taux très faibles, et que,
d’autre part, selon Thomas Piketty,« le retour de la croissance ne
résoudra pas l’essentiel des défis auxquels les pays riches doivent faire
face ». Daniel Cohen nous invite quant à lui à nous « affranchir
de notre dépendance à la croissance ».
Plus important encore, le retour – très improbable – d’une
croissance « à l’ancienne » n’est pas souhaitable si l’on pense à
l’avenir de notre biosphère, un avenir qui a commencé à se conjuguer au
présent, sous la forme de catastrophes dont la fréquence et la gravité
augmentent. Ce retour aggraverait encore la pression écologique des activités
humaines, dont le réchauffement climatique, et accélèrerait la destruction des
écosystèmes dont dépend le bien-être humain.
En 2013, c’est vers le 20 août que l’humanité a fini de
consommer le flux de ressources naturelles renouvelables que la nature peut lui
fournir en un an, et qu’elle a donc commencé à vivre à crédit en prélevant dans
les réserves de la « banque mondiale des ressources naturelles ». Or
ces réserves sont limitées. On ne peut pas très longtemps bruler ses meubles
pour se chauffer.
La déraison est du côté des mystiques de la croissance, la
raison du côté de la gestion commune de biens communs écologiques et sociaux, y
compris la monnaie et le crédit.
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