« Mon livre invite à stimuler la demande. On ne regarde que les dépenses, on ne s'intéresse qu'aux déficits, mais il faut retrouver un équilibre. Il faut emprunter et réaliser davantage d'investissements, dépenses publiques comprises ».
Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie, était l'invité du Tiger forum organisé par la TSE de Toulouse. Fidèle à des analyses en rupture avec le prêt-à-porter libéral, le professeur américain parle croissance, emploi, politique de la demande et dépenses publiques.
Mais comme Joseph Stiglitz est prix Nobel d'économie (2011), la voix porte, celle d'un homme de conviction qui n'a pas hésité à démissionner de la présidence de la Banque mondiale, qui explique encore aujourd'hui que les règles du jeu économique restent fixées par les pays industrialisés au détriment des pays émergents.
« Il faut stimuler la demande »
Et c'est toute une communauté qui s'est ainsi trouvée valorisée hier par la venue du célèbre professeur américain «au rendez-vous annuel mondial de la décision économique». C'était, pour lui aussi, la première présentation «physique» de son dernier livre – disponible à la librairie des Lois à Toulouse – intitulé « Créer une société de la connaissance : une nouvelle approche de la croissance, du développement et du progrès social »
Bien sûr, c'est un peu roboratif (et en anglais…), mais le professeur y renouvelle l'un de ses credo : on peut sortir de l'austérité non pas par la politique de l'offre chère aux économistes libéraux, au patronat et au gouvernement, mais par une politique de la demande. Iconoclaste prix Nobel ! «Le problème c'est un manque de demande», expliquait-il hier à La Dépêche. « Mon livre invite à stimuler la demande. On ne regarde que les dépenses, on ne s'intéresse qu'aux déficits, mais il faut retrouver un équilibre. Il faut emprunter et réaliser davantage d'investissements, dépenses publiques comprises ».
Le problème – enfin, l'un des problèmes –, c'est que la zone euro n'est aujourd'hui guère propice au développement de cette politique : « La zone euro n'a pas été définie comme une zone de monnaie optimale par les économistes. Une telle zone doit pouvoir arriver à bien gérer la monnaie commune sans différence. Mais, pour cela, il faut un système institutionnel qui permette de répondre aux chocs. A la place, on a eu un cadre flou qui a rendu le système instable. Et l'austérité instaurée depuis Maastricht a aggravé la crise ». Ce qui explique à ses yeux, la montée politique des extrêmes, illustrée notamment par le résultat des dernières élections européennes : « C'est la conséquence de l'austérité et des politiques imposées aux Européens », relève le professeur pour qui la zone euro peut sortir de la crise «avec une vraie solidarité européenne» qui suppose l'émission d‘euro-obligations mais aussi des taxes communes et naturellement une stratégie de croissance qui, avec la dépense publique, est à même de stimuler l'emploi. D'autres pensent qu'il s'agit d'une variable négligeable (ou alors accessoire) ? Stiglitz n'oublie jamais d'intégrer le facteur humain comme objectif ultime de l'économie. On comprend aussi que le prix Nobel a été conseiller de Bill Clinton mais pas celui de Thatcher hier ou Merkel aujourd'hui. Peut-être de Hollande demain, alors ?
« Honoré et fier »
« Honoré et très fier », Joseph Stiglitz. De son prix Nobel ? Oui bien sûr. Mais lundi à Toulouse, l'économiste évoquait précisément par ces mots le prix Jean-Jacques Laffont, qui récompense un économiste de haut niveau international dont les travaux combinent les aspects théoriques et pratiques, dans l'esprit du professeur Laffont. Le professeur, neuvième lauréat, a été reçu pour l'occasion au Capitole, le prix étant décerné par la ville de Toulouse et l'Institut d'économie industrielle, centre de recherche rattaché à Toulouse school of economics. L'occasion pour le professeur de découvrir la salle des Illustres, «l'une des plus belles» qu'il ait eu à visiter, selon ses dires. Hier, à l'invitation de la TSE, le professeur a participé à plusieurs conférences-débats économiques dans le cadre du Tiger forum, au sein des locaux de l'Arsenal à Toulouse.
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