Pour une fois, les Européens arrivaient unis face aux
Américains. Le G8 de Lough Erne, en Irlande du Nord, devait permettre de lancer en
grande pompe, avec Barack Obama,
les négociations visant à établir un traité transatlantique de libre-échange.
Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso,
a torpillé cette unité en affirmant, juste avant l'ouverture du sommet, que la
position de la France sur l'exception culturelle était "réactionnaire".
Que cette issue satisfasse ou non M. Barroso, peu importe
aussi. Il est président de la Commission et se trouve lié par le mandat qui lui
a été confié par les Etats. En dénigrant l'accord au lendemain de sa
conclusion, M. Barroso ne se comporte pas en gardien des traités, comme sa
mission le lui impose. Rappelons à une Commission qui se pique souvent de
juridisme l'article 4-3 du traité de Lisbonne :"En vertu du principe de
coopération loyale, l'Union et les Etats membres se respectent et s'assistent
mutuellement dans l'accomplissement des missions découlant des traités." En
l'occurrence, M. Barroso n'est ni "loyal" ni" respectueux".
Le commissaire au commerce, le Belge Karel De
Gucht, a adopté une attitude comparable. Il n'est pas parvenu à imposer ses
vues. Mauvais joueur, il prétend qu'il sera possible de réintroduire les
services audiovisuels dans la négociation. Il se paie de mots : à l'unanimité,
tout est possible ; en réalité, la France conserve son droit de veto sur le
sujet.
Mais M. De Gucht a une excuse : il va négocier avec les
Américains et craint que ceux-ci ne ripostent en écartant de la négociation des
domaines stratégiques pour les Européens. Si nécessaire, il veut pouvoir revenir
auprès des Vingt-Sept pour amender son
mandat de négociation.
M. Barroso, en revanche, semble avoir des
visées beaucoup plus personnelles. Depuis huit ans, le président de la
Commission s'est distingué par sa ductilité. Défenseur des petits Etats
lorsqu'il était premier ministre du Portugal, libéral lors de
sa nomination à Bruxelles avant la crise de 2008, sarkozyste sous la présidence
de Nicolas
Sarkozy, incapable, depuis, de la moindre initiative politique pour relancer l'Union,
il a accompagné le déclin des institutions européennes.
Aujourd'hui, à 57 ans, ce caméléon se cherche un avenir.
A la recherche d'un beau poste, à l'OTAN ou
aux Nations unies – qui sait ? –, il a choisi de flatter ses
partenaires anglo-saxons, le premier ministre britannique et le président
américain. A la tête de la Commission, M. Barroso aura été un bon reflet de l'Europe : une décennie de régression.
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