Le débat Gordon vs Brynjolfsson et McAfee
Par Bertrand Jacquillat - 24/07/2014
Aux Etats-Unis comme en Europe, on constate un déclin du
poids de l’industrie au profit du secteur des services. Le même basculement
semble s’opérer entre ces deux secteurs que celui intervenu dans la seconde
partie du XXe siècle entre l’agriculture et l’industrie. Celui qui s’opère
aujourd’hui est à relativiser dans la mesure où, en s’externalisant, une partie
des services n’est plus comptabilisée dans l’industrie. Ce basculement est par
ailleurs normal, les gains de productivité dans l’industrie étant supérieurs à
ceux dans les services, les prix relatifs des premiers par rapport aux seconds
baissent, ce qui mécaniquement diminue leur part dans la comptabilité
nationale.
Mais des doutes commencent à surgir quant aux gains futurs
de productivité et au potentiel de croissance de l’économie américaine. C’est
un débat qui fait rage dans les cercles académiques entre l’économiste de
Chicago Gordon et deux économistes du MIT Brynjolfsson et Mc Afee. Pour le
premier, l’âge d’or de la croissance économique américaine a commencé son
déclin à la fin des années 1990 après que la productivité eut bondi, et que les
immigrants et les capitaux eurent afflué pour profiter de la nouvelle économie.
Le taux de chômage avait baissé à 4 % et les économistes avaient révisé à
la hausse le potentiel de croissance de l’économie américaine à plus de
4 %. Ces croyances se sont évanouies, la sortie de la récession de
2008-2009 est la plus anémique de toute la période d’après-guerre et le FMI
comme la plupart des économistes ont révisé à la baisse, en dessous de
2 %, le taux de croissance potentielle de l’économie, et même encore plus
pour Gordon qui estime que les économies développées reviendront à leur rythme
de croissance séculaire bien inférieur à 1 %, essentiellement à cause de
la baisse de la productivité.
La croissance de la productivité, nourrie par la croissance
de la production horaire par actif, avait commencé à baisser avant 2007 et ce
phénomène s’est depuis accéléré. Pourtant ce sont les innovations qui
commandent les progrès de productivité et il y en a aujourd’hui beaucoup, entre
le “big data” et “l’Internet des choses “. Mais celles-ci mettent du temps à se
retrouver dans les statistiques de productivité, c’est la thèse des économistes
du MIT qui prévoient l’avènement d’une seconde révolution industrielle, encore
plus prometteuse que celle survenue au cours des XIX et XXe siècles.
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