mercredi 5 février 2014

L’avenir est à la bio-économie

Agrégé d’économie, il a enseigné l’économie au cours d’une longue carrière à l’Université (Rabat, Bordeaux, puis Paris) et il est aujourd’hui, professeur émérite d’économie à l’Université de Paris 1 – Sorbonne. Sa réflexion sur l’économie dépasse largement cette discipline. En la resituant dans l’histoire de l’humanité et l’évolution de la connaissance, en l’inscrivant dans la nécessité d’un humanisme tissé de valeurs morales, René Passet met constamment en question l’économie.

En 2050, le monde comptera environ 9 milliards d’habitants, aspirant tous, légitimement, aux niveaux de vie des peuples des pays industrialisés. La généralisation des standards de vie européens ou états-uniens actuels exigerait une quantité de ressources représentant 4 à 7 fois celles de notre planète.

Alors que toute la rationalité économique reposait sur la convention d’une nature avare de ses fruits mais elle-même inépuisable, l’humanité se trouve confrontée aux conditions strictement inverses de la destruction de ses ressources naturelles par des productions excessives.

En conséquence, d’un point de vue global, le «plus» de productions finales cesse d’être nécessairement le «mieux» et la question du «pourquoi ?» - c’est-à-dire des finalités, des valeurs et de l’éthique - devient incontournable pour l’économie ; celle-ci se heurte à sa vraie nature d’activité transformatrice de ressources et d’énergies « réelles » dont elle doit respecter les mécanismes de reproduction à très long terme ; le paradigme qui s’impose n’est plus celui de la mécanique, mais celui de la biologie et des systèmes complexes assurant la survie évolutive de l’humanité à travers celle de la biosphère à laquelle elle appartient. « Il n’est désormais d’économie viable qu’une bioéconomie ouverte aux lois de la nature ». Beaucoup de temps a été perdu.

Un rapport du programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) estime qu’une croissance mondiale compatible avec un retour aux consommations de ressources de l’année 2000 exigerait une division par trois de ces dernières pour les pays industrialisés et une stabilisation pour les autres. La quantité de contraintes à mettre en œuvre pour cela fait apparaître cette hypothèse comme difficilement réalisable. En revanche, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec) entrevoit la perspective d’un accroissement spectaculaire de la part des énergies renouvelables (proche de 80%) dans la consommation énergétique totale du monde. Tous les experts soulignent l’ampleur des efforts à effectuer.

Ni les politiques simplement défensives et restrictives ni des calculs d’apothicaire, ajustant à la marge les coûts et avantages des politiques environnementales, ne suffiront à régler le problème.

Dans un monde évolutif, on ne surmonte les difficultés que par dépassement. C’est à un effort considérable de recherche, d’investissement et d’innovation - à la fois technologique, économique et sociale - que doit être donnée la priorité : « La clé, a déclaré l’un des auteurs du rapport du Pnud, c’est l’innovation. » Il nous faut inventer un autre monde.


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