samedi 19 octobre 2013

Les énergies renouvelables loin du compte

Les énergies renouvelables progressent sans atteindre les objectifs fixés
Extrait de la synthèse du rapport de la Cour des comptes sur les énergies

La France s’est engagée auprès de la Commission européenne à atteindre 23 % de sa consommation finale brute d’énergie à partir de sources renouvelables à l’horizon 2020. Elle se situe ainsi, derrière l’Irlande, le Danemark et le Royaume-Uni, parmi les quatre Etats des 28 qui auront les efforts les plus importants à accomplir. Ses objectifs ont d’ores et déjà connu un début de réalisation, davantage marqué pour l’électricité que pour la chaleur. En 2011, la France se situait ainsi dans la moyenne des États européens pour la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie et respecte globalement sa trajectoire, dans chacun des segments.

Les retombées socio-économiques des mesures engagées ne sont pas encore à la hauteur du coût constaté. Les filières industrielles françaises, insuffisamment structurées, n’ont pas encore acquis de position significative sur le marché mondial. Ainsi, la filière solaire photovoltaïque, déjà largement affaiblie par la concurrence chinoise, a été, en outre, déstabilisée par les à-coups de la politique de soutien. La filière éolienne en mer est très largement dépendante des perspectives du marché en mer du Nord, pour l’instant incertaines. 
En dépit d’estimations fragiles sur le plan méthodologique (les emplois induits ne sont pas inclus, par exemple), le nombre brut d’emplois directs est Le besoin de choix de long terme soutenables 17 Synthèse du Rapport public thématique de la Cour des comptes passé globalement de 58 460 en 2006 à 83 260 en 2012, après un pic en 2010 à 98 580. La filière solaire photovoltaïque a connu la baisse la plus significative, conséquence de la baisse du soutien de la politique à partir de 2010. Ces estimations restent cependant très en retrait des ambitions exprimées dans le plan d’action national de la France en faveur des énergies renouvelables de 2009 qui évoquait la création de « plusieurs centaines de milliers d’emplois ». 
En outre, certains impacts de la politique n’ont pas été anticipés, notamment la désorganisation du marché de l’énergie. La montée en puissance des énergies renouvelables, bénéficiant d’une garantie d’achat quel que soit l’équilibre de l’offre et de la demande sur le marché, accentue la volatilité des prix et diminue la rentabilité des centrales thermiques à gaz, pourtant nécessaires à la gestion des pointes de consommation. 

Des paramètres insuffisamment pris en compte jusqu’à présent 

Les effets de la politique en faveur du développement des énergies renouvelables ne sauraient être mesurés à la seule échéance de 2020. En effet, dès 2005, la France, à l’instar de l’Union européenne, a considéré son engagement à plus long terme avec, notamment, la division par quatre de ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050. 
En outre, l’ambition de réduire la part du nucléaire dans le mix énergétique à l’horizon 2025, annoncée par le Président de la République à l’issue de la conférence environnementale de septembre 2012, engage nécessairement la France sur plusieurs décennies. La politique énergétique doit donc rester soutenable dans cette perspective. 
À cette fin, les émissions de CO2 doivent pouvoir être valorisées à leur juste valeur, soit par des mécanismes de marché, soit par la fiscalité, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. En raison de l’absence d’un marché efficace du carbone, la valorisation du CO2 n’entre pas en compte dans les calculs des coûts de production des différentes sources d’énergie. Ainsi, le carbone est aujourd’hui évalué, dans le système communautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE) de l’Union européenne, mis en place depuis 2005, aux alentours de 5 € la tonne. Or ce prix ne permet pas de rentabiliser économiquement la production d’énergies renouvelables. 
Pour éviter les effets déstabilisants de la production d’électricité renouvelable sur le marché (prix déconnectés des coûts, bouleversement de l’ordre d’appel des centrales, chute de la rentabilité des capacités de pointe, situation de prix négatifs), la France doit chercher à articuler ses dispositifs de soutien avec les fluctuations des prix de marché de l’énergie. Deux instruments, les certificats verts et les primes additionnelles au prix du marché, déjà utilisés ailleurs en Europe, pourraient être envisagés à condition de faire une évaluation précise de tous leurs impacts. 
L’essor des énergies renouvelables passe aussi par l’adaptation des modes de consommation afin d’inciter les consommateurs à plus de sobriété énergétique. Un nouveau modèle de consommation doit s’esquisser. La voie de l’autoconsommation pourrait être envisagée pour les installations individuelles mais, faute de dispositifs de stockage performants, elle devrait s’accompagner de systèmes d’effacement volontaire de la consommation en période de pointe et d’arrêt ou de limitation de production en période de faible consommation. 

Enfin, compte tenu du coût de leur adaptation, estimé par ERDF et RTE à 5,5 Md€ à l’horizon 2020, la réflexion sur l’évolution des réseaux doit être menée en parallèle au développement des énergies renouvelables.

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